Conseil de coopération du Golfe. Des lois trop générales exploitées pendant la pandémie pour étouffer davantage la liberté d’expression

Des pays membres du Conseil de coopération du Golfe (CCG), plus précisément Bahreïn, le Koweït, Oman, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, se sont servis en 2020 de la pandémie de COVID-19 comme d’un prétexte pour faire perdurer des pratiques qui étouffent le droit à la liberté d’ expression, écrit Amnesty International le 15 octobre 2020 dans une déclaration détaillée.

Dans ces États, des lois trop générales sont invoquées pour criminaliser les « fausses informations » et convoquer, arrêter, enquêter et poursuivre en justice des personnes qui publient sur les réseaux sociaux des contenus ayant trait à la pandémie ou à la réponse qu’y apporte le gouvernement.

Lynn Maalouf, directrice régionale par intérim pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient à Amnesty International, a déclaré :

Les États du Conseil de coopération du Golfe n’ont pas justifié en quoi ces mesures sont nécessaires et proportionnées à la protection de la santé publique

Lynn Maalouf, directrice régionale par intérim pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient à Amnesty International

« Des personnes sont soumises à des actes de harcèlement et d’intimidation uniquement pour avoir discuté de la pandémie en ligne, en violation flagrante du droit à la liberté d’expression.

« Ces États ont de nouveau choisi d’user des moyens à leur disposition pour museler tout débat public, cette fois-ci au sujet de la pandémie de COVID-19, et il est clair qu’ils cherchent plus à éviter un examen public qu’à protéger la santé publique. L’accès à l’information est en effet essentiel pour que la population soit informée régulièrement des mesures à prendre pour se protéger de ce virus.

« Aussi appelons-nous les pays membres du Conseil de coopération du Golfe à mettre un terme à ces pratiques injustifiées, à faire en sorte que chacun et chacune puisse s’exprimer sans crainte de représailles et à redoubler sans délai d’efforts en vue de diffuser des informations fiables, accessibles, fondées sur des faits et dignes de confiance, ce qui est crucial pour contrer les informations fausses et mensongères. »

Amnesty International a passé en revue les déclarations officielles de ces pays, diffusées via les comptes de réseaux sociaux des gouvernements et via les commentaires émanant de sources gouvernementales destinés à la presse nationale contrôlée, depuis le mois de mars jusqu’à aujourd’hui.

Complément d’information

Le droit à la liberté d’expression est protégé au titre du droit international relatif aux droits humains, principalement en vertu de l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH). Bahreïn et le Koweït ont tous deux adhéré au Pacte. Oman, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis comptent parmi les quelque 7 % d’États membres de l’ONU qui ne sont pas parties au PIDCP.

Tous les pays membres du Conseil de coopération du Golfe (CCG) disposent de lois trop générales sur la « sécurité publique », qui sont fréquemment invoquées pour sanctionner des formes d’expression légitimes. Ces dernières années, ils ont adopté de nouveaux textes répressifs sous forme de lois antiterroristes ou relatives à la cybersécurité. Toutefois, de nombreuses dispositions inscrites dans leurs codes pénaux sont également incompatibles avec le droit à la liberté d’expression et continuent d’être utilisées pour étouffer toute critique sur Internet.

La prohibition générale de la diffusion d’informations en vertu de concepts vagues et ambigus, tels que les « fausses nouvelles » ou la « désinformation », est incompatible avec le droit international relatif aux droits humains. Le droit international ne permet pas d’interdire l’expression d’opinions erronées ou d’une mauvaise interprétation d’une situation.